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Note moyenne 10/10
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A force de dire a tout va que je voulais lire les Conquérants de l'inutile de Lionnel Terray, me voilà à en avoir deux pour mon anniversaire. Armé du tiquet de caisse, me voila de retour au rayon des couverture rouge des éditions Guerin. Je lis une dizaine de résumés … Ai-je envie de lire le livre d'Alex Honnold sur son ascension d'el Captain en free solo alors que j'ai vu le reportage ? Pas sur … Born to run ? Moi déteste courir … Mais il y a ce livre : A la verticale de soi. J'accroche au résumé : une grimpeuse, une championne même qui a passé des années pendue au bout d'une corde. Un confession et un retour sur sa vie en toute sincérité. Je laisse le récit d'aventure à M Terray et je décide de partir pour cette autobiographie.
Résumé :
C'est l'histoire d'une enfant asthmatique qui serre très fort un caillou dans sa main pendant le supplice des cours de gym. D'une petite fille sensible qui aime rêver hors des sentiers. Qui du plus loin qu'elle se souvienne a choisi de regarder sa vie de haut, à la verticale de soi.
Perdue pour le sport, Stéphanie Bodet s'est vouée à l'escalade. Dans tous les sens du terme. Des années de compétition aux vagabondages verticaux sur des parois lointaines, elle s'émerveille des bivouacs glacials sous les étoiles, de la puissance de l'amour et de l'éclat des heures suspendues comme un contrepoint à la lourdeur des jours.
C'est l'histoire d'une jeune femme de 40 ans qui, à l'heure des rendez-vous avec soi-même, se livre avec une totale sincérité, à l'affût de ses doutes, de ses fragilités, dans sa recherche d'une vie « vraie » dont le sens est sans cesse à réinventer. Championne d'escalade et aventurière, Stéphanie Bodet explore toutes les facettes de l'ascension depuis plus de vingt ans. À la Verticale de soi est son second livre après Salto Angel.
Mon avis :
Il faut donner un contexte émotionnel : nous sommes en novembre 2020, confinés pour la deuxième fois alors lire est encore plus le moyen de s'évader. Je ne l'ai pas dévoré, j'ai essayé autant que cela est possible de le savourer pour rêver un peu en cette période ou nous sommes cloués au sol. Ce livre a été un vrai régal.
Il faut tout d'abord dire que ce n'est pas un récit d'aventures, de dépassement de soi, d'effort, d'escalade impossible (notons tout de même qu'elle travaillera durant sa vie des voies dans le 8C...). Bien sur il y a des noms, et même de très grands noms de "big walls" au travers du monde (et même de magnifiques photos) mais ce ne sont que des étapes dans un parcours spirituel d'une grimpeuse de renom. Ainsi, on voyage d'étapes en étape : de l'enfance aux premiers pas sur un mur, des premières compétitions et victoires à un drame familial, de la rencontre avec son conjoint, Arnaud Petit, à l'évolution de sa pratique de l'escalade sportive vers les sommets alpins et même, à la fin, au ralentissement du rythme, pour s'écouter plus, prendre le temps de vivre. C'est une confession écrite à l'âge de la quarantaine sur plus de 20 années d'escalade au travers du monde. 20 ans d'une vie de nature et d’escalade revue par une femme amoureuse des mots qui contemple le monde tout autant qu'elle le grimpe. L'escalade y a toute sa place mais c'est un regard tourné vers l'intérieur, vers soi, vers ce que ce sport lui apporte, nous apporte ? Il y a des exploits mais ils n'importent pas autant que le cheminement personnel livré dans ces pages.
Stéphanie Bodet a fait des études de lettre et cela transparait dans ce texte avec un style littéraire. Très agréable à lire mais un peu déroutant au début ! Quoique, les fervents pratiquants de la nature n'ont-ils pas été inspirés par elle pour écrire ? Pour paraphraser l'introduction : "En escalade, on parle de style. [...] Le style est le principal point commun de la grimpe et la littérature." On ressent l’âme d’une poète tout autant que celle d’une grande grimpeuse.
Ce qui m'a le plus plu se sont les fulgurances que j'ai trouvé dans le récit. Stéphanie Bodet est dans une quête du bonheur et laissant place à ses émotions, elle nous livre des pensées qui font echo à ce que je peux ressentir aujourd'hui dans ma pratique de l'escalade. Et je pense que tout le monde y trouvera echo. Je cite :
"Je repense au choix d'Arnaud. Après avoir gagné les championnats d'Europe en 1996, [...] il a compris que sa vraie voie, celle de son cœur, était sur les grandes parois".
"Le premier contact avec une voie ressemble à une rencontre amoureuse. On en a rêvé de loin on la découvre soudain dans son intimité, dans le grain de sa peau et ses replis calcaire. On en épouse tous les contours, tous les reliefs. On s'apprivoise ainsi mutuellement, tremblant à l'idée de ne pas se correspondre."
"Tenter une longueur qui nous inquiète, c'est se promettre d'y être en dépit des doutes et des difficultés."
"Ce que je constate c'est que l'alpiniste, le cycliste ou le marcheur, forcé de se frotter physiquement à la géographie, demeure plus longtemps sur son lieu de voyage. Aux horizons changeants, sirènes du voyageur pressé, je préfère l'univers de la verticalité. Je ne me dis pas : je serai mieux là-bas, plus loin. Je suis simplement là et tout est parfait".
Elle parvient à mettre le doigt sur ce que nous recherchons en montagne, la raison qui nous pousse à mal dormir en refuge, marcher des heures de nuit, se meurtrir en grimpant … Ce "pourquoi" nous aimons l'escalade, que l'on soit grand champion ou simple pratiquant.
Conclusion :
Un magnifique livre à lire tout simplement.
"Tout reste à gravir"
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